Pierre Mazet auteur de nombreux Polars et passionné d’Histoire nous propose aujourd’hui une promenade au pied des immeubles pas ordinaires.
A l’occasion des chroniques précédentes, nous avons croisé quelques grands architectes : Les Lamaizière, Dalgabio et Joanny Morin, qui nous ont laissé quelques belles réalisations. Cependant en levant la tête, on découvre encore quelques merveilles ou originalités, démontrant ainsi que l’imagination des architectes est parfois sans limite.
La maison sans escalier
Ainsi au 54 et au 56 du boulevard Daguerre s’élèvent deux immeubles conçus par l’architecte Auguste Bossu. Malgré leurs six étages, ils ne possèdent ni escalier, ni ascenseur. A la place, une rampe en pente douce, de forme hélicoïdale dessert les 35 appartements. Auguste Bossu édifia le premier immeuble en 1933, et devant son succès, en bâtit un second en 1939. Cet architecte visionnaire a tout d’abord conçu ces édifices selon le principe de la copropriété, avec des techniques de publicité innovantes, comme la réalisation d’un appartement témoin meublé.
Mais sa réflexion sur « la maison de demain »portait encore plus loin, jusqu’à supprimer le traditionnel escalier. « L’escalier est un moyen barbare de monter les étages. Les marches imposent à tous le même pas : aux enfants comme aux vieillards, aux malades comme aux bien portants, déclarait-il. Avec notre montée par galerie en plan incliné, chacun fait le pas qui lui convient, long ou court, rapide ou lent, comme on le fait sur le trottoir. » Surmontée d’une coupole en béton percée de briques de verre, une rampe de 1,70 mètre de large s’enroule en spirale autour d’une vaste cour intérieure, conduisant aux appartements par une pente douce. Ainsi, c’est sans heurt que l’on accède à son domicile, et « à son rythme » que l’on redescend vers l’entrée de l’immeuble, accueilli par des jets d’eau et des compositions minérales. C’est le même système que l’on retrouve au musée Guggengheim de New York, construit dans les années cinquante.
L’immeuble David dit le « Palais Mimard »
Le « Palais Mimard » trône au 5, de la Place Anatole France. Il fut la possession de deux personnages importants de la vie stéphanoise. Il a été construit à l’instigation d’Adrien David, rubanier de son état. Bien sûr, il passa commande à l’architecte en vogue de l’époque Léon Lamaizière.
Un atelier dans la cour est conçu pour son fils qui étudiait la peinture à Paris. L’architecte construit également l’immeuble mitoyen au n°7 pour la belle-mère et l’épouse du commanditaire. Le style éclectique de cette demeure est luxueux : alliant néo-gothique et néo-renaissance italienne, elle est l’un des rares exemples de ce type d’architecture à Saint-Etienne. La façade allie brique et pierre de Villebois pour le soubassement et de Saint-Paul Trois-Châteaux (comme pour la Bourse du travail) pour les étages. Le décor intérieur raffiné dessiné par Marcel Lamaizière s’inspire de l’Art nouveau et met en valeur les matériaux modernes de l’époque, notamment le métal. En 1905, ce fut un autre grand industriel stéphanois qui racheta l’ensemble.
L’ancienne Condition des Soies.
L’industrie rubanière a marqué profondément l’architecture stéphanoise. La production et le commerce du ruban s’organisent au sein de l’espace de la Fabrique, qui regroupe en centre-ville les lieux de production (immeubles-ateliers de passementiers) et de négoce (immeubles à cour de rubanier). L’essor de l’industrie rubanière entraîne en 1808 la création d’une Bourse aux Soies. Installée tout d’abord place du Peuple, puis dans l’actuelle rue de la Résistance, la Condition des Soies déménage en 1909 dans de nouveaux locaux, toujours en plein coeur du quartier des rubaniers au 11 de la rue Elisée Réclus.
Sa conception fut confiée à Léon Lamaizière. ll était conçu jusqu’en 1962 pour effectuer les opérations techniques et réglementaires propres à la rubanerie. En calcaire, la façade est ornée des courbes de l’art nouveau avec des motifs de la rubanerie et du mûrier. Les fers forgés de la grille d’entrée, de la rampe d’escalier et des fenêtres, rappellent la première activité de cet immeuble.
J’ai travaillé à “La Condition des soies” pour un service de la Chambre de Commerce – La Chambre de Commerce y avait également installé son Ecole… Merci pour cet article