Pierre Mazet auteur de nombreux Polars et passionné d’Histoire nous présente des stéphanois dont parfois nous ignorons l’existence….
Aujourd’hui : Jean Dasté : Du théâtre du Chatelet aux planches stéphanoises.
Bien que né à Paris, en 1904, le nom de Jean Dasté est lié de manière indissoluble à l’histoire du théâtre stéphanois et au-delà, tout simplement à l’histoire de Saint-Etienne.
Jusqu’à l’après-guerre, Jean Dasté est un comédien de théâtre et de cinéma. A treize ans, il fréquente le Châtelet. Il devient ensuite élève dans la troupe du Vieux Colombier du célèbre Jacques Copeau, dont il épousera la fille, Marie-Hélène. C’est probablement la forte proximité avec son beau-père qui lui donne cette passion de l’osmose entre acteurs et spectateurs. Entre 1924 et 1919, il participe activement à une première tentative de décentralisation en Bourgogne, en créant le « Groupe des Copiaux ».
Après ce premier essai, Dasté revient à Paris en gardant en tête de faire sortir le théâtre des salles. En 1934 il fonde « La compagnie des quatre saisons » avec André Barsacq, et, comme l’esprit des bateleurs l’anime toujours autant, il monte Le Médecin volant sur le Pont Neuf et Les Fourberies de Scapin sous la Tour Eiffel.
Parallèlement, il entame une carrière cinématographique. Jean Renoir le fait débuter en 1932 dans Boudu sauvé des eaux, puis lui donne des rôles secondaires dans Le Crime de M. Lange (1936), La vie est à nous (1936), La grande illusion (1937). Mais, c’est Jean Vigo qui lui donne ses meilleurs rôles dans Zéro de conduite (1933) et L’Atalante (1934). En 1947, sa vie prend un tournant décisif.
Après un échec relatif à Grenoble, il débarque à Saint-Etienne, à l’invitation de la municipalité. Il y crée « Le centre dramatique de la Cité des Mineurs » (qui deviendra l’année suivante « La Comédie de Saint-Étienne »), coopérative ouvrière d’intérêt public régional. Pendant plus de dix ans, « La Comédie », comme elle est appelée en abrégé par les Stéphanois, sillonne les routes de la région stéphanoise en apportant à son public des auteurs aussi divers que Shakespeare, Molière, Beaumarchais, Pirandello, Tchekhov, Claudel ou Lorca et en l’initiant à Sartre et Audiberti. « La Comédie » devient une pépinière nationale et internationale qui attire de jeunes talents alors peu connus et qui vont devenir d’illustres têtes d’affiche.
Ainsi « La Comédie » voit passer notamment, Delphine Seyrig, René-Louis Lafforgue, Armand Gatti, Antoine Vitez, Peter Ustinov. Il est à l’origine d’une nouvelle génération d’hommes de théâtre, à l’image de Roger Planchon et de Marcel Maréchal à Lyon. Pour eux, le théâtre est un moyen d’expression qui permet, au travers d’un texte, d’entrer en contact avec le public.
Par sa réussite, Dasté a prouvé que dans une ville dite « ouvrière », il y a la place pour une culture de qualité, à condition que celle-ci prenne en compte les spécificités du public. A partir de 1963, Jean Dasté prend ses distances et renoue avec le cinéma, tournant avec Alain Resnais, Henri Verneuil et Costas Gavras.
Après plus de 40 films et d’innombrables mises en scène, Jean Dasté meurt à Saint-Étienne, le 15 octobre 1994. La place, qui fait face à la nouvelle comédie de Saint-Etienne porte désormais son nom.