Le visionnaire Jean-Marie Rouart voit Michel Barnier comme une chance pour les traditions française. Jean-Marie Rouart analyse la nomination du Premier ministre sous Macron : “Michel Barnier, la revanche de la France traditionnelle sur le nouveau monde d’Emmanuel Macron”
Dans un contexte politique troublé, Emmanuel Macron, au bord du gouffre, trouve une planche de salut inattendue en la personne de Michel Barnier, figure emblématique de l’ancien monde qu’il avait pourtant cherché à dépasser. L’académicien Jean-Marie Rouart souligne avec une certaine ironie ce paradoxe : le président, qui a toujours prôné la rupture avec les anciennes pratiques, se voit contraint de faire appel à une figure classique de la politique française pour sauver son mandat.
La nomination de Michel Barnier suscite des réactions contrastées, mais deux sentiments dominent. D’abord, un soulagement palpable pour les valeurs conservatrices. En effet, Barnier incarne la stabilité, le retour à une politique plus prévisible et rassurante pour une partie de l’opinion, lassée des réformes perçues comme chaotiques du gouvernement précédent. Ensuite, l’on ressent une coupure nette avec ce que Rouart appelle “le monde des apparences et des fanfreluches”, une ère où la communication semblait primer sur l’action politique concrète.
Avec l’arrivée de Barnier à Matignon, on sort d’une impasse qui menaçait de conduire le pays vers une crise institutionnelle profonde. Instabilité, tensions sociales, remise en question des fondements mêmes de la République : la situation avait atteint un point critique. Barnier, de par son expérience et son ancrage dans la tradition républicaine, apparaît comme l’homme de la situation, capable de remettre de l’ordre là où le désarroi régnait.
La dissolution de l’Assemblée nationale, annoncée avec fracas mais menée dans une confusion totale, a plongé la France dans un climat d’incertitude politique. Plutôt que de clarifier la situation, cette décision a renforcé les divisions et fragilisé encore davantage l’exécutif. Emmanuel Macron, jusque-là perçu comme un capitaine sûr de lui et de sa ligne de conduite, a soudain semblé perdre pied. Comment expliquer qu’un président ait pu, volontairement, s’engager dans une telle impasse ?
C’est dans ce contexte que la nomination de Michel Barnier prend tout son sens. Pour Jean-Marie Rouart, elle marque une revanche du “vieux monde” sur le projet de rupture incarné par Emmanuel Macron. Pourtant, la tâche qui attend le nouveau Premier ministre est immense : il devra non seulement restaurer la confiance des Français, mais aussi naviguer habilement entre les attentes contradictoires d’un électorat divisé. Si l’espoir renaît, il faudra de la finesse politique pour éviter que cet espoir ne se transforme, à terme, en nouvelle désillusion.